J’approche de Strasbourg, toujours en suivant le canal. Les péniches sont nombreuses, je passe devant des champs d’asperges, c’est le début de la saison des récoltes. Les colzas sont en fleurs, au loin à l’Est on distingue les montagnes allemandes. Nous sommes au nord de Strasbourg, dans la zone commerciale Nord il y a la grande roue, une des plus grandes d’Europe. Et ce soir je bivouac dans le pré de François, ancien jokey, qui m’invite à manger une flammekueche maison. Enfin, quatre flammekueches maison, qu’on partage avec son amie Carole qui a beaucoup voyagé en Australie, Italie, France… François est un ami de famille de Céline d’où je suis parti ce matin. Au petits soins pour nous, Céline avait tout fait pour nous faciliter le séjour et la suite de notre périple en Alsace. Merci encore Céline et Nico.
Ça y est, c’est le grand jour, il faut traverser Strasbourg. Ça commence le long du canal où les cyclistes du dimanche ne veulent pas partager le chemin de Compostelle aménagé en piste cyclable. Certains, installés sur leur vélo de contre la montre, veulent exploser leur record. Sauf que le chemin doit être partagé et est limitée à 15 km/h. J’arrive au parlement européen où je fais la pause pique-nique. Une dame me propose sont jardin mais trop loin de mon itinéraire. Je reste dans le parc derrière le parlement. Honoré est l’attraction du parking tout proche et les touristes sont nombreux en ce beau jour de Pâques. Même les résidents des immenses immeubles autour descendent caresser Honoré. Enfin sauf une vieille qui gueule de son balcon qu’on n’a rien à faire ici. Ce qui faire rire ses voisins et les touristes en bas de l’immeuble. Cela a pour effet de vexer la dame qui va chercher son appareil photo et me mitraille copieusement. Bref, je fais ma pause.
Je prends maintenant la direction de cathédrale où je dois retrouver mon ami Marcel Loeffler, célèbre accordéoniste de jazz manouche qui réside à Strasbourg. En route, une dame qui n’avais pas vu Honoré, se heurte à une sacoche en se retournant et tombe. Honoré effrayé par la chute, me bouscule. Je comprends tout de suite que quelque chose n’est pas normal et me retourne. Je propose mon aide à la dame pour la relever et vérifier que tout va bien. Elle se relève seule et m’assure qu’elle n’est pas blessée. Mais c’était sans compter sur des personnes bienveillantes et procédurières, qui me prennent en photos, prêtes à alerter la police pour venir contrôler si j’ai une autorisation de traverser la ville, ce qui n’existe pas au passage ! Un type s’approche de moi en me disant que la dame est très gravement blessée, alors qu’il ne l’a même pas regardée, il n’a même pas vu qu’elle est debout derrière lui. Une pouffe essaie de m’empêcher de partir en me bousculant. Décidément, quand on arrive en milieu urbain, la détresse mentale de l’humain n’a aucune limite. Malheureusement, c’est à cause de ces comportements abjects, qu’on arrive aux résultats des élections du week-end dernier.
Heureusement en arrivant à la cathédrale je rencontre des gens plutôt agréables, bien qu’un peu envahissant à l’égard d’Honoré. Mais ça, je m’y attendais, forcément quand on marche en ville avec un âne on attire les regards. Comme prévu je retrouve Marcel qui m’accompagne un bon bout de chemin avec son amie Michèle. Ça m’a fait super plaisir de passer ce moment avec lui. Mais nos chemins doivent se séparer et je dois trouver un bivouac. Épuisé par la journée c’est finalement dans un centre équestre que je passe la nuit. Je suis super bien reçu, Honoré a même droit à du bon foin. Nous partons de bonne heure, mais quand même après un café avec Jean-Luc, le patron du centre équestre. Il y a un concours de sauts d’obstacles et les premiers cavaliers ne vont pas tarder. Je sais que les ânes font parfois peur aux chevaux, j’imagine qu’un jour de concours n’est pas idéal pour stresser les équidés.
Il fait beau, pas trop chaud, le paysage est magnifique le long du canal de la Bruche. Mais toujours autant de cyclistes en mal de vitesse. J’aperçois les premières vignes d’Alsace. En arrivant sur Avolsheim, j’ai le canal en premier plan, les vignes en second et les Vosges au fond. Puis j’arrive à l’Église Saint Pierre le long du chemin de Compostelle. Il y a de l’eau, des tables et beaucoup d’herbe. Il y a tout pour bivouaquer. Mais il est encore tôt et il y a du monde. J’attends le temps qu’il faut et installe le campement. Je n’ai pas pu ramasser de déchets hier en ville et aujourd’hui le long du canal, le chemin était trop étroit et les cyclistes trop rapides. Mais cet après-midi, j’ai beaucoup discuté avec les nombreux promeneurs et camping-caristes. Et on a même vu un dromadaire ! Même que le pauvre vivait avec un âne décédé la semaine dernière et il a cru qu’Honoré était son copain. Triste pour lui, mais drôle de rencontre, surtout en Alsace.
Je prends mon temps ce matin, le temps que la tente sèche. Je traverse Molsheim et prend mon pain pour les jours qui viennent. À la sortie, il y avait encore une passerelle, en béton mais étroite. Après négociations, Honoré finit par passer. Je dois trouver un coin pour pique-niquer, Marcel doit me rejoindre avec Michèle. Je m’arrête assez tôt et profite de la pause pour lire le livre de Xavier, « Mon port est une île » qui est agréable à lire et très instructif. Marcel et Michèle arrivent, on déjeune, ils ont même pensé à m’apporter une bière bien fraîche. Merci pour le repas, Honoré a bien fait le coquin le temps qu’on mangeait… Je me remets en marche, on arrive dans les vignes et les premières pentes. J’avais téléphoné à la mairie de Boersch pour un bivouac, Joël l’adjoint m’a rappelé et donné le téléphone de Pierrette que je rappelle dès que je sais quand j’arrive. Elle m’accueille dans le pré derrière la maison, m’invite à prendre une douche et à dîner. Joël nous rejoint à l’apéro, puis madame le maire. Les discussions autour des déchets sont riches et chacun apporte son idée. C’est constructif et enrichissant. Chouette soirée. Puis vient le dîner, et là quelle chance, André le mari de Pierrette est breton et le couple a ouvert une des premières crêperies de Strasbourg. Ce soir j’ai la chance de manger des vraies galettes bretonnes, délicieuses. Merci pour le repas et la soirée.
Aujourd’hui la journée était superbe mais physique, avec l’ascension du Mont Sainte Odile. Une belle grimpette de 7 kilomètres qui se termine par des escaliers qu’Honoré franchi sans sourciller. Arrivé en haut, le parking est bien occupé et les touristes allemands surtout mais aussi espagnols, viennent caresser Honoré et lui donner à manger, évidemment sans me demander mon avis. Je dois intervenir plusieurs fois, mais ils laissent leurs mômes courir autour. Heureusement qu’il est sage, j’ai prévenu du risque de coup de pied, débrouillez vous avec vos mômes. Le point de vue est superbe mais je n’ai pas accès aux abords du prieuré, interdit aux animaux. Dommage, les plus beaux paysages sont visibles par là. Il est temps de redescendre, je marche derrière un couple d’Alsaciens mais qui me disent aller dans la même direction que moi. Vu l’équipement, je vois que ce sont des randonneurs avertis et les suits aveuglément. Mais il semble qu’on s’est mal compris, quand je regarde la carte, je suis à l’opposé du chemin que j’avais dessiné. Bon, pas grave, je peux rattraper plus loin. Mais le chemin est moins large, à flanc de montagne et la pente vertigineuse. Il y a des pierres, Honoré glisse. Je le retiens par la longe mais je me rends bien compte que s’il glisse, je ne pourrais pas le retenir sans chuter avec lui. Demi-tour ! Enfin, dès que le chemin le permet. Le détour me rallonge et il n’y a pas de réseau. Heureusement j’avais appelé la mairie pour le bivouac du soir. L’adjoint au maire m’a trouvé un camping à la ferme chez Joëlle Bachert, vigneronne à Barr. Je vous parle de la suite dans le prochain post, avec la pause chez Muriel et une intervention auprès des habitants à Saint Pierre.