Ce matin il a encore gelé un petit peu. J’arrive à Avranches et fais un détour par Décathlon pour essayer de nouvelles chaussures. Mais non, impossible de remplacer mes Lowa. Il faudra que je commande via Internet. La traversée de la ville se fait sans problème. C’est à la sortie qu’Honoré me test en voulant brouter en marche. On retrouve des dénivelés, ça faisait deux semaines que nous vivions au niveau de la mer dans les polders. Mais en Normandie, les ingénieurs des ponts et chaussées de l’époque ne devaient pas savoir tracer des courbes, parce que les côtes sont droites, pas de lacés comme en Auvergne. Du coup ça fait des pentes à 18% voire 20%. C’est du haut d’Avranches que nous regardons une dernière fois le Mont-Saint-Michel, avec une pointe d’émotion quand-même. Il aura été notre phare pendant ces deux semaines et il signifie que nous en avons terminé avec la Bretagne.
On fait une pause à Saint-Senier-sous-Avranches où je rencontre Franck, adjoint au maire, lui aussi heureux propriétaire d’ânes. Je fais ma pause pique-nique ici puis repars vers La Godefroy où je suis accueilli par le conseil municipal réuni pour organiser l’arrivée du Père-Noël. Les conseillers m’apportent du pain et terrines maison et la maire une part de tarte normande. Ben oui on est en Normandie. Les habitants de La Godefroy sont aussi très accueillants, on m’offre le thé, Timéo vient caresser Honoré avec Gwendoline, sa maman, qui m’invite à passer en soirée prendre une douche chaude et dîner quand son mari Hubert va rentrer. Il travaille dans une boulangerie et ramène souvent les invendus qui font le repas du soir. C’est vrai que la bonne douche et la pizza ont été un vrai réconfort. On a repris nos habitudes de tri, c’est d’ailleurs près des colonnes de tri que m’a repéré Franck. Mais entre les deux villages, pas grand chose à ramasser, une habitante le fait régulièrement et semble efficace. Par contre, après la portion du GR22 qu’elle nettoie, le travail reprend. Le chemin est en piteux état, gadoue et ornières ralentissent nos pas. Pas étonnant, on se fait doubler par un quad puis on croise trois motos cross en faisant demi-tour. Parce qu’en plus d’être défoncé, le chemin a été modifié par la fédération de randonnée, sans en avertir les élus semble-t-il. Ni l’IGN, parce que les marquages sont différents de ce que propose la carte. Et je l’ai téléchargé hier, la carte, via l’application IGN rando. Bref, on ramasse les déchets.
Honoré me surprend, on arrive sur une portion de chemin qui n’est plus entretenu, un fort dénivelé glissant me fait hésiter à continuer dans cette direction. J’accroche la longe sur le bât afin de ne pas encombrer la marche de mon coéquipier aux grandes oreilles, je commence la descente… Honoré me regarde d’un air moqueur et s’en va de l’autre côté. Me voila tout penaud au fond d’un trou avec un âne qui m’abandonne. Mais non, il a choisi simplement un passage moins périlleux. Quelle intuition !
Honoré est aujourd’hui particulièrement sage, s’arrête quand je lui demande, tourne à droite quand je dis « à droite »… Faut dire que ce midi il a bien mangé au pied des trois croix de Petit-Celland. Le trajet se poursuit fraîchement mais avec le soleil jusqu’à Brécey. Je trouve un bivouac près de maisons en construction sur un terrain viabilisé par la mairie. Le propriétaire du crédit (pas encore de la maison ) m’ouvre l’eau pour Honoré et que je puisse me laver.
La nuit est fraîche mais il n’a pas gelé. Il fait 5° ressenti -5° d’après météo France, moi je dirais -10° avec ce vent. Le paysage vallonné permet de se réchauffer, mais la pause de midi dans un verger, me glace les doigts et les orteils. Je me colle à Honoré pour lui emprunter un peu de chaleur et je lui demande de me réchauffer. Et là, vous ne devinerez j’aimais ce qu’il fait ! Il me pète dessus ! « Dis-donc Honoré, je veux pas être chauffé au gaz moi ! « 
Ha oui j’oubliais, la Normandie, c’est la région du débarquement américain, mais c’est aussi le pays des pommes (comme la Bretagne) et donc du cidre, calvados, pommeau, tartes aux pommes… Mais c’est aussi le pays des chevaux. Il y en a dans chaque hameau. Et Honoré a peur des chevaux. On va s’amuser pendant les semaines à venir !…
J’ai froid et j’ai du mal à me réchauffer, je cherche à abréger la journée pour entrer dans mon duvet. Je repère les maisons avec du terrain, demande chez un particulier qui semble ne pas avoir compris ma demande. Il me répond qu’il n’a pas de place, sans doute a-t-il pensé que je voulais dormir chez lui. Tant pi, je viens de voir qu’une des maisons devant laquelle on est passé, a une cheminée qui fume, je fais demi-tour et une voiture arrive justement à la maison précédente. Je vais toquer et c’est Laura qui m’ouvre. Lenny et Willow, les enfants, se hâtent pour trouver le lieu de bivouac idéal pour Honoré. Je m’installe et je suis invité à prendre un café chaud. Whaou, ça tombe bien, ça va me réchauffer. Laura me propose de prendre une douche, je ne refuse pas. Pendant ce temps, elle avait contacté la correspondante de La Manche Libre, un hebdomadaire local, qui vient ce soir faire un article sur notre périple. Chouette ! La correspondante fait son article, Fabien, le conjoint de Laura arrive et nous prenons l’apéro. C’est le meilleur moment de la journée. Puis je suis invité à dîner, le bonheur total. Les enfants sont adorables et j’ai même droit à deux jolis dessins, que je vous partage avec leur autorisation. La magie de Noël opère. Après le repas nous faisons une partie de jeu de société, c’est Lenny qui gagne, je ne suis pas très doué. Je vais me coucher, il ne fait pas trop frais le soir mais au matin le gèle blanchi l’herbe et durcit 3 mm de glace du sceau d’Honoré. Après un bon petit déjeuner au chaud, je plie la tente encore gelée et ne part que vers 10 heures.
L’étape du jour sera courte, je vais faire du woofing pendant les fêtes de Noël, histoire de ne pas avoir à chercher de bivouac pendant les fêtes et en plus la pluie revient. Je vous en reparle très vite, bonnes fêtes de fin d’année à tous.