Cette nuit au camping de « Le Bleymard » a été mouvementée avec l’orage. On a tout eu, vent, grêle, éclairs, tonnerre et la foudre est tombée pas très loin. Le Lot, qui coule tout près, a légèrement gonflé mais ne nous a pas inondé. Toutefois les sols encore secs de l’été caniculaire ont eu du mal à absorber toute l’eau qui commençait à s’infiltrer dans la tente par le bas. Par chance, l’orage a pris fin juste au point critique, j’avais mis tout ce qui craignait dans le sac à dos et m’apprêtais à sortir de la tente pour me réfugier plus haut et vérifier qu’Honoré allait bien (il avait la possibilité de se mettre en hauteur). Je sors quand-même de la tente, vais voir Honoré qui s’est mis à l’abri et pars à la rencontre de mes voisins de camping. Le courant a disjoncté et ils attendent le cantonnier. Tout le monde a eu peur, une fois que tous sont rassurés, chacun retourne se coucher.
Je prends mon temps pour partir, tout est trempé, mais au creux de la vallée, le soleil ne chauffera pas avant 10 heures. Alors j’attaque la journée qui s’annonce difficile avec 12 kilomètres de montée. Pique-nique en haut, juste après le Mont Lozère et la station de ski. C’est au moment de la descente que tout s’est compliqué. Ça descend abrupte, il faut parfois sauter des rochers mais Honoré s’en amuse. Quand tout à coup il faut passer un ruisseau. On a passé une dizaine de gués ce matin, mais là il faut juste enjamber un ruisseau de 50 cm de large, il ne veut pas. Avec l’orage, le ruisseau fait du bruit qu’Honoré refuse d’affronter, violemment. À tel point qu’il me fait tomber. Je me sais mal au genou, recommence, insiste, mais rien, il tire au renard et m’envoie au bord du ravin. Là j’ai peur, j’ai mal, je suis fatigué. Je craque ! Je suis au milieu de nulle part, impossible de remonter à cause des rochers infranchissables en montée, impossible de descendre à cause de ce clapotis sous les pierres. C’est tellement abrupte que je ne peux pas dormir ici… Je suis en pleurs, épuisé, déprimé, j’ai mal au dos, au genou, au mollet. La pause est dans trois jours, il faut que j’y arrive ! Au bout d’une heure et quelques chutes, je décide de remonter en espérant trouver un passage, quand tout à coup, je vois un petit panneau en bois écrit a la main « le cros ». Je regarde sur la carte, aucun chemin n’est représenté depuis ma position, mais c’est mon seul espoir. C’est à travers bois, pentu mais ça passe, le passage fléché à la peinture verte, conduit à une prairie puis à une ferme. Là, je rattrape un chemin qui me mène au GR7 que j’avais quitté plus haut. Ouf, mais que de temps perdu, impossible d’aller où je pensais bivouaquer ce soir, trop loin, trop isolé si je dois trouver un plan B. Heureusement, il y a un hameau nommé Hôpital, ancienne commanderie des Templiers, où je trouve une habitante qui me propose son terrain. Je suis soulagé et même si ça me repousse la prochaine pause, tant pis, on s’adapte, je suis trop fatigué pour aller plus loin.
La fatigue probablement, me fait manquer de lucidité puisque j’oublie de demander le prénom de cette accueillante cévenole. D’autant que ce matin avant le départ elle m’offre le café et des tartines. Nous avons beaucoup échangé notamment sur l’environnement mais pas nos prénoms. C’est dans les nuages et sous la pluie que nous partons de ce lieu splendide.
La journée de marche est difficile, pas tant par les dénivelés mais par la nature du terrain, tantôt parsemé de gros blocs de granit, tantôt sablonneux mais pentus, donc avec de profondes ornières causées par les épisodes cévenols, c’est-à-dire de fortes précipitations qui peuvent parfois emmener des blocs complets de terrain y compris avec les arbres. C’est donc un exercice fatiguant par la concentration nécessaire afin d’éviter la chute, protéger mollet et genou déjà bien abîmés par les kilomètres, mais aussi prendre soin d’Honoré qui, jeune fougueux, a envie de s’amuser. Heureusement il est plutôt agile mais il n’empêche que je dois rester vigilant sur ce terrain particulièrement technique. On rencontre des bergers qui surveillent les brebis, ici le loup a fait des ravages, il faut être vigilant.
La descente vers Vialas est à la fois technique et vertigineuse mais la vue est magnifique et impressionnante. Et depuis longtemps j’aperçois au loin un horizon tout plat. Serait-ce la Méditerranée que nous apercevons déjà ? Ce soir c’est bivouac à la sauvage mais demain si tout va bien, nous arrivons en pause. Nos organismes en ont grandement besoin. Aujourd’hui j’ai très peu ramassé le déchets, mais il faut préciser que 80 % du chemin parcouru était composé d’estives dans le parc naturel des Cévennes. On a croisé des vaches et des moutons, la dernière estive était normalement réservée aux chevaux mais nous n’en avons pas vu. Mais j’ai été surpris du calme avec lequel Honoré est venu saluer les vaches Aubrac et les brebis. Un vrai âne de paysan.
Depuis déjà quelques jours l’accent des locaux ne fait aucun doute, nous sommes bien dans le sud. Mais aujourd’hui c’est encore plus flagrant, la végétation, les pins, parfois même les oliviers et bien sûr l’architecture, attestent visuellement de l’évolution de notre trajet. Malheureusement, on aperçoit aussi les ravages causés par les incendies. Mais sur les hauteurs, pour la première fois je découvre le Mont Ventoux.
J’arrive au camping du vieux moulin à Peyremale où je suis accueilli par Jonathan le gérant. Son camping m’accueille pour me remercier de mon action sur l’environnement, j’en suis très touché. Boris, des ânes de Philemon, et son ami Gilbert m’accueillent à leur tour pour nous escorter vers le pré où se trouvent Bijou et Cadeau, les ânes avec lesquels il fait de la rando avec ses clients. Les trois équidés s’entendent tout de suite très bien, ça fait plaisir de les voir gambader ainsi.
Boris a contacté son réseau et aujourd’hui nous partons du camping avec d’autres ânes et des bénévoles pour aller ramasser des déchets dans les environs. C’était une super journée avec de nombreux échanges avec les participants et ça fait super plaisir de voir à quel point les gens se sentent impliqués par la protection de l’environnement. Je suis toutefois un peu déçu que la presse locale ait boudée cette action spontanée. Nous avons refait une après-midi ramassage sur les bords du Luech, le ruisseau qui longe le camping qui m’accueil.
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Vous êtes de plus en plus nombreux à nous suivre et commenter, partager mes publications, je vous en remercie. Ça me touche énormément et m’apporte la motivation qui me manque parfois dans les coups durs.
Beaucoup d’entre vous me suggèrent de publier un livre de notre aventure. Bien sûr c’est en cours et j’espère qu’il sera à la hauteur de vos attentes. Les publications Facebook sont un résumé de ce que je prévois pour le livre. Car je ne publie pas tout ici, il y a des choses personnelles qui peuvent avoir un intérêt dans le livre mais aucun sur les réseaux sociaux. Et surtout, qui ne sont pas soumis aux commentaires, parce que trop personnel ou sujet difficile à modérer efficacement. Pour la sortie du livre, j’organiserai des conférences dans lesquelles j’espère rencontrer ceux qui nous suivent via les groupes et que nous n’avons pas encore croisés.
La somme qui restera sur la cagnotte leetchi.com/c/tdfane servira à financer la publication du livre. Merci à tous pour votre aide précieuse.