Premier jour de marche.

Avant de commencer à marcher, je dois compléter mon équipement. Départ tôt de la maison, sac à dos chargé dans la voiture, direction Clermont-Ferrand. Et surtout Décathlon pour acheter le réchaud qu’il me manque et une serviette microfibre, bien moins encombrante et beaucoup plus légère qu’une serviette en coton, tout en ayant une capacité d’absorption égale.

Murol me voilà.

C’est le 11 septembre, il fait beau mais encore un peu frais ce matin. Ces derniers jours, l’été a décidé de nous abandonner pour laisser place à l’automne, tout au moins côté températures. La radio rappelle les « événements du 11 septembre » ce qui ne me fait pas regretter de me déconnecter quelques jours du rythme infernal des infos déprimantes.

À Murol, le mercredi, c’est jour de marché. J’en profite pour y faire un petit tour, j’adore les marchés de villages, très dynamiques, où l’on croise des gens qui prennent le temps de sourire et de profiter de la vie. La voiture est déjà garée sur le parking de la supérette du village, mais je préfère aller prévenir le gérant que mon véhicule va rester là quelques jours au cas où il gène. Aimablement, il me fait remarquer que si un camion plus grand qu’à l’habitude vient le livrer, la place sera juste. Je la déplace, endosse le sac à dos, ajuste les bretelles et c’est parti. En même temps, il est au courant qu’une voiture étrangère restera ici quelques jours, ça peut éviter bien des déconvenues.

Le petit tour au marché m’a mis en conditions, mais je démarre lentement, c’est la première fois que je suis aussi chargé. Le sac pèse 13 Kg. Je prends la direction du Tartaret pour rejoindre le GR30. L’aventure commence ! Et le paysage m’accueille, magnifique, dépaysant en cette fin de matinée. Je croise des vacanciers, des retraités pour la plupart qui profite d’une belle arrière-saison. Voilà, ça y est, dernière maison, je tourne à gauche, je suis sur le GR30. Je fais quelques ajustement, j’avais acheté un petit mousqueton tout à l’heure, je vais l’utiliser pour accrocher la gourde, c’est trop contraignant de poser le sac lourd pour boire une simple gorgée. Je traverse un petit hameau typique de la région, Jassat. C’est déjà la fin de la matinée, le chemin monte et descend doucement, comme pour m’habituer sans me brusquer aux dénivelés qui m’attendent. Je me familiarise avec les marques blanches et rouges qui m’indiquent le chemin que je veux suivre. Le GPS est avec moi au cas où, mais je préfère marcher « à l’ancienne ».
Je suis seul sur le chemin. Ça tombe bien, c’est ce que je suis venu chercher ici à cette période. Les oiseaux, l’ombre des pins, le soleil à travers les branches… Super agréable. Je croise un groupe de trois jeunes en arrivant à une intersection, eux aussi ont des sacs à dos avec des tentes. Sûrement des trekkeurs. Mais je dois tourner à droite. Ha ! Les choses sérieuses commencent. Le dénivelé vient de changer, une pente raide et sableuse se profile devant moi. Je croise un autre trekkeur, mais impossible pour lui de s’arrêter, la pente est trop abrupte.

Je monte péniblement et quand enfin la pente est moins rude, je rencontre deux types qui viennent de terminer leur déjeuner, assis sur une souche. Ils me cèdent la place en me souhaitant bon appétit et bonne rando. Je les remercie et leur souhaite une agréable marche aussi. Je sors mon réchaud pour me préparer des nouilles chinoises, mais me rend compte que la gourde en plastique que mon fils m’a prêté, a un horrible goût de plastique. Heureusement je n’ai pas très faim, je vais donc me contenter de manger un sachet de fruits secs pour apéritif. C’est amplement suffisant et nourrissant. En arrivant à Besse, je nettoierai correctement la gourde pour m’assurer une quantité suffisante d’eau.
Je me prépare un petit café et entreprends la fin de l’ascension. Je sors de la forêt, arrive sur un plateau d’où je découvre une vue magnifique sur la chaine des Puys et le Sancy. Une vue à couper le souffle, où l’on prend la mesure de la grandeur du site.

J’arrive maintenant à Courbanges. Il y a un gîte pour randonneurs idéalement placé sur le GR, tout en haut de la vallée de Chaudefour. C’est beau ! Quelques cheminées fument et me font penser que j’ai peut-être vu un peu juste avec mon duvet 15° pour cette nuit…
A proximité, un itinéraire proche de celui que je m’étais programmé, attire ma curiosité. Il est noté sur les flèches « Horizons, arts nature en Sancy ». Je décide de suivre et ne suis pas déçu, un peu de couleur est agréable.

Après ce petit détour culturel, je poursuis ma progression vers Besse. En sortant de la forêt, je trouve un feu de camp encore fumant. Bien que sécurisé, j’ajoute de la terre pour éviter toute reprise, la sécheresse de cet été caniculaire pourrait bien transformer ce feu en catastrophe pour cette forêt et l’exposition artistique qu’elle accueille.
Entre la forêt et Besse-et-Saint-Anastaise, je ne croiserai que des vaches et des chevaux. Sur le plateau, entre les prairies fermées, il n’y a rien d’autre à faire que de profiter de la grandeur du paysage. Les fermes anciennes me font rêver. A l’époque, les bêtes vivaient au-dessus de l’habitation ce qui permettait d’isoler et de chauffer la maison.


La descente à Besse est agréable, bordée par des bouchures garnies de mûres que je déguste au passage. J’y double trois jeunes filles qui font quelques réserves de mûres pour leur pique-nique du soir j’imagine car elles portent également du matériel de camping. En bas du village, la Couze Pavin est bien maigre mais rafraichie quand même un peu. Vu que je ne suis pas pressé, je prends le temps de m’arrêter boire une bière sur la place principale. C’est la dernière occasion d’avoir un contact avec la civilisation avant demain après-midi. Je profite de la pause au cœur du village médiéval, remplie et nettoie les gourdes pour ce soir. Il serait bien que je mange chaud.

La sortie de Besse est toute aussi agricole que l’entrée. Enfin par le chemin que je suis, toujours le GR30. Parce que par les chemins locaux PR (Promenades et Randonnées) ils font passer par le côté plus moderne qui mène au Lac Pavin par des chemins qui longent la route de la station de Super-Besse.

Je continue donc ma progression vers le Lac Pavin par la forêt, passe près du lac d’Estivadoux qui est devenu une tourbière en formation. La zone est protégée, les animaux ne sont pas admis, il faut enjamber des barrières et traverser les estives en côtoyant les vaches. Les bovins me regardent passer sans se détourner de leur sieste ou de leur repas.
La fatigue commence à se faire sentir, mais je veux atteindre le lac Pavin ce soir et monter mon bivouac à proximité. Demain l’ascension du Sancy sera longue, j’aimerais la faire le matin avant qu’il n’y ait trop de monde.

Après avoir traversé l’estive, le Lac Pavin. J’arrive par le haut et ne peux qu’admirer la vue plongeante sur le plus profond lac de volcan de France (93 m de profondeur, 750 m de diamètre). Il est aussi le plus jeune volcan de France. Les jeunes filles que j’ai doublé en arrivant à Besse sont déjà là et repartent vers le lac. De mon côté, e me mets en mode recherche pour trouver le spot idéal pour passer la nuit et le bord du lac n’est pas ce qui me permettra un total repos.

Ici il y a trop de monde, des touristes, camping caristes… Je ne serais pas au calme. Je décide donc de faire une brève pause pour profiter de la vue et entamer la descente en quittant le GR30, lui préférant le GR4A. Je croise un couple qui vient du Puy-de-Montchal équipés de simples baskets.
– « Nous avons dû rebrousser chemin, nous ne sommes pas suffisamment équipés » m’explique le mari.
– « Mais vous êtes bien chargé, vous allez marcher encore loin comme ça ? » me demande l’épouse.
– « Il me reste encore trois jours de marche » répondais-je d’un sourire.
– « Trois jours ? Et vous allez monter le Sancy avec ce gros sac sur le dos » questionnait la marcheuse.
– « Heu oui c’est en tout cas ce que j’ai prévu » affirmais-je insouciant.
– « Et vous n’avez pas peur de dormir seul dans la nature ? » poursuit-elle.
– « Non pourquoi est-ce que je devrais avoir peur ? » …
– « Hé bien, bon courage alors » conclu le couple tandis que je les remerciait.
Puis, chacun d’entre nous repris son chemin.
La descente est longue et je commence à m’impatienter de trouver un endroit suffisamment plat pour pouvoir monter ma tente. Quand enfin je le trouve, c’est un ancien chemin, tout proche d’un prés de vaches. Je dépose mon sac, quitte mes chaussures et chaussettes et commence à repérer les lieux. Les vaches m’ont repéré, je fais le tour de leur prairie avec elles pour vérifier que le parc est bien clôturée. Je n’ai pas envie qu’elles viennent piétiner ma tente cette nuit. Après vérifications, je retourne au lieu choisi pour établir mon campement et installe la tente. Une fois le montage terminé, je commence à déballer mes affaires pour préparer mon repas du soir. Quand j’entends du bruit derrière moi. Mes voisines ont cassé la clôture pour venir voir ce que je fais. Je me lève rapidement pour les effrayer. Elles rentrent dans leurs pénates aussi rapidement que possible.

Il est temps de recharger les batteries, ce soir-là au menu c’était nouilles chinoises, gâteaux aux céréales et chocolat, thé à la menthe ramassé sur place. Le soleil se couche sur la station de Super-Besse, il est temps de dormir.
Dans la nuit, vers 1 heure, un bruit de mâchouillement me réveille. Mes voisines ont encore fait le mur et sont juste derrière la tente. Heureusement, elles préfèrent l’herbe fraiche que la toile de tente. Je me lève, les effraie avec ma lampe frontale. Elles déguerpissent et je peux retourner me coucher.
La nuit a été fraiche mais réparatrice.