En repartant du pays de Bernard Hinault, je me dis que je ne peux pas garder ces bouteilles dans les sacoches. Trop lourd pour Honoré, trop fragiles, et trop tentant. En même temps, si je dois passer Noël tout seul dans la nature, ça pourrait aider, mais non c’est décidé, je fais un détour par Dinan pour envoyer le butin à la maison. La pluie ponctue le trajet, mais Dinan est une belle ville. On rattrape la Rance que nous traversons par le pont mobile de la Hisse, comme conseillé par Marc et Alexandre. En effet, c’est super joli. Mais il faut trouver un lieu pour se mettre à l’abri, dès ce soir et demain toute la journée, avis de tempête avec rafales à 80 km/h. En vain, tout ce qui est possible est trop loin, les mairies fermées… Je trouve un terrain derrière une forêt, je sonne… Une dame âgée ouvre timidement et m’autorise à m’installer. Mais pas trop près de la maison, hein ! Je sens bien qu’elle n’est pas rassurée, mais je n’ai pas le choix il se fait tard, le vent se lève, il faut vite que je m’installe. Je retourne chez elle chercher de l’eau pour me laver et pour Honoré. Je n’aurais rien de plus. Le vent se lève rapidement et avec lui le froid venant du Nord et les grêlons qui l’accompagne. Je sens déjà que la nuit va être compliquée et fraîche. Au matin je comprends vite que je ne pourrai pas bouger de la journée. Le vent, la pluie, la grêle et le manque de réseau… La journée va être longue. Je me décide toutefois à aller voir la grand-mère pour lui demander de charger la batterie et emprunter les WC. Elle finit par accepter pour la batterie, mais pour le petit coin, elle fait semblant de ne rien entendre. Je dois donc aller chier dans les bois.
J’en profite pour remercier ma fille de m’avoir offert le livre « comment chier dans les bois » qui regorge de conseils pratiques et surtout hygiéniques, sur l’art et la manière de faire la commission sans polluer l’environnement. Tant qu’à parler de déchets, celui-ci en fait parti et doit respecter quelques règles. Outre le côté pratique (et le bon sens) d’éviter de déposer la chose sur le passage pour ne pas marcher dedans (on pense aussi aux copains quand on marche en groupe), on évitera aussi de faire son popo au bord d’une rivière où cours d’eau quelconque. Les bactéries que contiennent la chose, risquent fort de polluer ledit cours d’eau (Escherichia-coli par exemple). Ceci étant dit, la parenthèse est importante pour éviter tout débordement. Pour le pipi je vous laisse avec votre imagination, je rappelle juste que nous sommes en avis de tempête… Et qu’il fait froid. Ha, mon côté poète revient, faut que je me ressaisisse. Pour rester dans les déchets, toujours la même quantité ramassée chaque jours, soit 20 litres de déchets non recyclables et au moins autant de plastiques. Ici il y a peu de bennes collectives, mais assez de colonnes de tri sélectif. Je ramasse toujours peu en ville par sécurité, surtout avec le vent sur le plastique qui effraie Honoré. Et pas du tout quand il pleut, parce que tout est bâché par sécurité aussi, mais en plus pour l’hygiène et pour préserver le matériel. Voilà, fin de la parenthèse.
Sinon un jour de tempête sous la tente, sans réseau… Hé ben on se fait chier. Voilà. Il y a bien quelques rafales qui nécessitent de tenir la tente (en fait on a dépassé les 110 km/h). Au passage, bravo Décathlon, la tente Trek 900 vendue pour des rafales à 80 km/h, a tenue la part belle aux 110km/h et a la tempête qui a soufflée la plupart du temps à 75-80km/h pendant 36 heures. Bon le gars dedans un peu moins, mais la tente, oui. Parceque 1° avec ce vent du nord, immobile dans une tente, le ressenti est plutôt de l’ordre de -5°. Les arbres alentours ont aussi soufferts, j’en ai entendu tomber. Sinon, le matelas changé à Décathlon Rennes, se dégonfle déjà. Alors, que faire pendant la tempête ? Hé bien heureusement que j’ai envoyé les bouteilles, parce que je suis tombé dans la confiture de châtaignes de Calorguen et le miel de Marc. Un excès de sucre que je vais vite consommer dans les prochains jours, sans aucun doute. En tout cas ce sont des saveurs réconfortantes. Autrement j’ai essayé d’organiser autrement les sacs à dos, mais l’espace est restreint et les contorsions, pas au programme pour mes vertèbres déjà douloureuses. Le vent souffle toujours en ce dimanche de novembre, abaissant le ressenti de la température. J’avance doucement, m’arrête au Carrefour-Contact de Pleudihen-sur-Rance racheter du pâté, sardines et brioche. On fait ce qu’on peut pour le midi, ça ira bien. Je marche quelques kilomètres été arrivant dans le bourg de Miniac-Morvan, une voiture s’arrête à ma hauteur. « Votre âne est magnifique » me lance Isabelle qui se gare quelques mètres plus loin. Rapidement, elle me propose de venir bivouaquer chez elle. Mais il n’est que midi, c’est un peu tôt. Tant pi, malgré le beau temps, je ne refuserais pas une douche, j’ai besoin aussi de me raser, j’accepte sa proposition. En route un autre véhicule s’arrête à ma hauteur pour me proposer un bivouac à 5km d’ici. Tant pi, j’ai accepté chez Isabelle et je ne regretterai pas. Le pré est magnifique pour Honoré, il y a de la place sur la pelouse pour la tente et une douche chaude m’attend. Le bonheur total. Je rencontre Madani, le mari d’Isabelle et Thomas et Samuel, les enfants du couple. Isabelle et Madani sont très fières de leurs enfants, faut dire qu’il y a de quoi, ils sont tous deux étudiants, l’un en école d’ingénieur statisticien, l’autre en médecine. Bravo messieurs ! Et comme c’est dimanche, Alfred, le grand-père, apporte la tarte aux pommes et je suis invité à la partager avec toute la famille. Quel réconfort ! Et en plus le soir je suis invité à dîner, une vrai galette bretonne maison. La famille dispose d’un terrain d’un hectare et s’interroge sur son entretien. La surface est trop petite pour un agriculteur, alors l’idée d’y mettre des ânes leur a traversé l’esprit. Il faut dire que 2 ou même 3 ânes y seraient heureux. En tout ça Honoré valide l’idée. Le lendemain matin, la tente est gelée mais un bon café chaud m’attend. Je reprends la route plus tard que d’habitude mais prendre son temps, ça fait du bien. Et puis la météo annonce encore une semaine de pluie. Je profite des prises de courant pour recharger batterie et téléphone et contacter un potentiel woofing près du Mont Saint Michel. Ce serait parfait pour être à l’abri et trouver où passer Noël. À ce propos, Isabelle m’a glissé une enveloppe à ouvrir à Noël avec le linge que j’ai lavé et qu’elle a fait sécher sur les radiateurs. Wahou.